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Un bref historique de l’arpentage et l’équipement de levé

Écho boréal | Éte 2020

Par : Peter Afshar, Spé cialiste de systè mes et services

L’ arpentage existe depuis bien longtemps et a connu de nombreuses transformations au cours des derniers siè cles. Je considè re mê me cette profession comme un sé rieux candidat au poste de deuxiè me plus vieux mé tier du monde 😉. Alors que plusieurs professions similaires sont devenues dé suè tes, celle d’ arpenteur a poursuivi sa croissance et s’ est fortement dé veloppé e depuis ses origines. De l’ é poque où l’ on rétablissait les frontiè res suite aux crues annuelles du Nil, jusqu’ à l’ orientation du vaisseau Dragon de SpaceX dans la trajectoire approprié e afin qu’ il puisse rejoindre la Station spatiale internationale, vous serez certainement d’ accord avec moi que nous avons ré alisé d’ énormes progrè s depuis ces dé buts modestes et pragmatiques !

Les humbles origines de l’ arpentage ont dé buté par la simple mesure de distances à l’ aide de cordes et chaî nes. Dans l’ objectif de ré gler les litiges relatifs à la proprié té , des chaî nes standard approuvé es par le gouvernement ont é té introduites, puis suivies par des rubans de mesure gradué s. Lorsque les terres sont devenues plus précieuses, afin de ré pondre à la volonté grandissante de possé der les terrains et bâ timents les plus dé sirables, le dé veloppement d’outils plus modernes est devenu iné vitable. Les arpenteurs doivent des remerciements à Brad Wadley, un Sud-africain qui a conçu le premier systè me de mesure é lectronique de distances (EDM), utilisant des faisceaux é lectromagnétiques pouvant mesurer des distances sur des kilomè tres.

Appareils électroniques

Comme c’est le cas pour bien d’autres appareils électroniques, ce monstre a été miniaturisé et raffiné au cours des années qui ont suivi. Comme nous le verrons plus loin, ces changements ont permis de révolutionner la manière de travailler des arpenteurs modernes d’aujourd’hui.

Au même moment, les arpenteurs étaient déterminés à parfaire les mesures angulaires. Plusieurs trouvent les racines de cette initiative dans l’Égypte ancienne, où la mesure précise d’angles s’avérait primordiale pour la construction des pyramides. Il en allait de même pour s’assurer que les murs de châteaux demeurent bien verticaux et ne s’effondrent pas en raison de leur poids et taille. La poursuite de la beauté aux époques grecque et romaine exigeait par ailleurs des pièces aux angles droits et respectant une géométrie parfaite. À cette fin, un dispositif de pointage/ciblage le long d’un cercle gradué est rapidement devenu un outil essentiel pour les bâtisseurs. Les Égyptiens lui ont donné le nom « alidade », et un autre instrument d’arpentage a ainsi vu le jour. L’alidade existe aujourd’hui sous plusieurs formes, dans une variété d’outils optiques.

MRA1

MRA1 : L’un des premiers distancemètres électroniques

Le premier transit était composé de deux rapporteurs et d’un télescope montés sur une alidade; après quelques modifications, il s’est ensuite transformé en théodolite. Des théodolites dotés d’un niveau à bulle circulaire et tubulaire sont toujours utilisés pour mesurer des angles verticaux et horizontaux avec précision.

Des alidades, sous différentes formes et fonctions

Bientôt, la mesure « précise » d’angles devient la mission et préoccupation principales des arpenteurs. La première leçon de l’arpentage moderne consiste à apprendre comment effectuer la mise à niveau d’un théodolite. Les débutants ont rapidement constaté que le nivellement d’un transit au-dessus d’un point sur le sol s’agissait d’une compétence acquise.

Vers le milieu des années 1980, la fièvre des technologies numériques se répandait autour du monde et le théodolite est devenu le premier des outils d’arpentage à combler le fossé.

Circular and tubular bubble lever

Niveaux à bulle circulaire et tubulaire

Théodolites

Le petit frère du théodolite, simplement appelé « niveau », était muni d’un télescope horizontal et servait uniquement à mesurer les élévations et niveaux. Le fait que les niveaux ne mesurent pas la hauteur mais plutôt les différences d’altitude représente un secret bien gardé des gens non familiers avec le domaine de l’arpentage. Lorsqu’une règle ou mire graduée est placée à deux points distincts, une différence d’élévation peut être déduite. Si l’un des points possède une hauteur connue, cette élévation peut être transférée par l’entremise d’un niveau automatique. Comme on peut s'y attendre, la version numérique des niveaux dotés d’une mire à code-barres est apparue en compagnie des théodolites numériques au milieu des années 1980.

Theodolites
Theodolites
Theodolites

Transit, théodolite optique et théodolite numérique

Au début des années 1990, un arpenteur bien équipé disposait d’une multitude d’instruments, les remplaçant l’un après l’autre au-dessus d’un trépied. L’efficacité pouvant encore être améliorée, l’idée de combiner de multiples appareils en un seul s’imposait en toute logique. Un sage ingénieur a donc déclaré : « Combinons le distancemètre électronique avec un théodolite numérique et un capteur de niveau puissant. » Puis voilà : la station totale est née.

Circular and tubular bubble lever

Niveau numérique Trimble DiNi et mire à code-barres

Comme on peut bien se l’imaginer, la station totale a entièrement changé la manière d’exécuter des projets d’arpentage. Grâce à la géométrie de base, la combinaison de mesures d’angles et de distances a rendu possible l’obtention de coordonnées en temps réel, assurant ainsi une implantation plus rapide et précise du plan de conception sur le terrain. Un autre aspect de cette révolution permettait le stockage, le transfert, la manipulation et le calcul électroniques des données obtenues. De cette façon, les entreprises d’arpentage ont réussi à mieux utiliser leur personnel pour la gestion de projets plus vastes et élaborés.

Ornamented paps

Tandis que les stations totales évoluaient dans le cadre de différentes applications, les ordinateurs personnels subissaient leur propre renaissance. Jumelés aux stations totales, des logiciels topographiques variés sont devenus le pain quotidien des arpenteurs modernes. Un triste résultat de la nouvelle ère numérique s’est concrétisé avec la disparition progressive de l’art et la personnalisation liés à la production de cartes ou plans d’arpentage. Les cartes décorées et agrémentées sont maintenant devenues des artéfacts exposés dans des musées.

Pat Hills est notre Directeur du marketing technique. Bien qu’il ne soit pas lui-même considéré comme un artéfact, voici une page tirée des notes de terrain qu’il a saisies en 1987.

Stations totales robotisées modernes

Les stations totales modernes lancées au cours du nouveau millénaire constituent en effet des robots. Elles possèdent des moteurs faisant tourner le télescope pour suivre une surface réfléchissante ou un prisme. Ces instruments exécutent automatiquement des tâches de mesure, permettant ainsi d’éviter les échanges constants, tout au long de la journée, entre l’arpenteur et son personnel de soutien.

A modern Trimble Robotic Total Station

Une station totale robotisée moderneTrimble

Les stations totales peuvent être programmées pour mesurer les coordonnées de tous les points dans un intervalle prédéfini sur un mur ou dans sa périphérie. Parallèlement à d’autres simplifications de routines d’arpentage, 30 scanners laser ont été introduits en tant que nouveaux instruments de levé au futur prometteur. Il s’avère que des individus provenant de différentes disciplines, lesquels hésitaient traditionnellement à employer des techniques d’arpentage, trouvaient qu’il était relativement facile d’utiliser ces 30 scanners.

Après des siècles marqués par l’implication de scientifiques en géométrie et mathématiques, c’était au tour aux des physiciens d’introduire de nouveaux concepts et défis, tels que la définition de la taille et forme de la Terre, la localisation par l’entremise de coordonnées terrestres, les influences liées à la gravité, et bien d’autres; ainsi est née la géodésie. Les géodésiens étaient en mesure de jouer sur un terrain plus large, leurs yeux fixés sur notre planète, à une altitude plus élevée.

Les géodésiens étaient également chargés de marquer les limites politiques entre les pays – des lignes qui ont été effacées et redéfinies au fil de siècles marqués par des guerres. Hong Kong, parmi d’autres colonies, garde encore des monuments géodésiques impressionnants au sommet de collines, lesquels étaient utilisés pour mesurer la superficie de ces nouvelles colonies.

Geodetic monument on top Mount Butler, Hong Kong

Un monument géodésique au sommet du mont Butler, à Hong Kong

Afin de répondre à la demande croissante d’un outil permettant de fournir un positionnement à grande échelle plus rapide et précis, un système de navigation satellite a été développé. Plus de trente satellites ont initialement été lancés en orbite pour diffuser des signaux pouvant uniquement être reçus et traités adéquatement par des appareils au sol spécifiquement dédiés à cet effet. Ces dispositifs pouvaient convertir ces signaux en une distance entre le récepteur terrestre et le satellite. En connaissant les coordonnées de trois à quatre satellites, la position du récepteur au sol pouvait être calculée par trilatération. Ce système de positionnement et navigation par GPS demeure de nos jours omniprésent. Les États-Unis et l’Union soviétique (la Russie) ont été les premiers à établir leurs constellations satellite dans l’espace (Navstar et Glonass), suivis par l’Europe, la Chine et le Japon (Galileo, Beidou, QZSS). Tous ces systèmes GPS composent le système mondial de navigation par satellite (GNSS) tel que nous le connaissons aujourd’hui.

A modern Trimble R10 GNSS receiver

Un récepteur GNSS Trimble R10

Pour atteindre des précisions à quelques centimètres, des réseaux RTK comme Can-Net ont été développés, permettant aux arpenteurs de recevoir des corrections GPS en temps réel par l’entremise de réseaux cellulaires. Les arpenteurs ne doivent ainsi plus posséder et entretenir leur propre station de base, ni trouver et vérifier des bornes géodésiques pour compléter leurs projets.

Quelqu’un désire-t-il s’aventurer à prédire quels progrès nous réservent les technologies de notre industrie ?

Peter Afshar
Spécialiste de systèmes et services
Cansel